Alors qu'il travaillait pour le compte de la société ROTSCHILD, l'actuel ministre de l'Economie, Emmanuel MACRON, s'était occupé du dossier de la société LABCO.
Cette société, spécialisée dans le rachat de laboratoires d'analyses médicales, fait partie des plus grands groupes mondiaux d'analyses médicales.
En 2012, l'un des associés majoritaire, la société 3I, a souhaité sortir du capital et pour cela a tenté de céder sa participation.
Ne trouvant aucun acquéreur au prix souhaité, la société LABCO a donc envisagé son introduction en bourse (pour une analyseboursière, voir article http://bourse.lesechos.fr/infos-conseils-boursiers/infos-conseils-valeurs/conseil-du-jour/un-reseau-de-laboratoires-d-analyse-d-envergure-1048546.php ).
Or, les articles L6223-5 et L6223-8 du code de la santé publique s'opposent à une telle opération, les effets de l'introduction en bourse contrevenant à leurs dispositions qui limitent la qualité des détenteurs de parts.
Qu'à cela ne tienne, la société LABCO a décidé de faire fi de ces dispositions légales, et a engagé le processus d'introduction en bourse, en modifiant notamment ses statuts qui prévoient maintenant dans un article 8.2 intitulé "Transferts libres" que n'est pas soumis à l'article 8.3, qui limite la libre transmission des parts, tout transfert par un actionnaire (k) "dans le contexte d'une introduction en bourse".
Bien évidemment, cette modification s'est accompagné des modifications habituelles concernant le droit de préférentiel de souscription.
Et si LABCO a pris la précaution de se faire couvrir par les autorités ministérielles compétentes (budget, santé et justice) en demandant confirmation vraisemblablement par voie de circulaire que l’interprétation de l’article L 6223-5 du Code de la Santé publique « ne peut en aucune façon donner lieu à l’application des sanctions prévues en cas de violation de ce texte » (voir l’excellent article http://www.labster.fr/index.php/blog/item/35-analyse-aebm-1409 qui développe tous ces points), il est surprenant de constater que les démarches nécessaires à cette entrée en bourse aient pu être engagées avant que réponse à cette question ne soit donnée.
Surprenant également de constater que des extraits de procès- verbaux datant de 2005, 2008 (concernant l’émission de Bons de Souscription d’Actions) et 2012 ( possibilité d’émettre des actions ordinaires et augmentation de capital) ne sont déposés au greffe du tribunal de commerce que le 13 avril 2015.
On peut donc s'interroger sur les raisons qui poussent la société LABCO à ne pas respecter la loi et ce au vu et au su de la Ministre de la santé, laquelle a été destinataire d'une lettre en date du 28 avril 2015, adressée par l'AEBM, le Syndicat des Biologistes ayant par ailleurs édité un communiqué de presse auquel était joint copie d'un courrier qu'il avait adressé au président de l'Autorité des Marchés Financiers le 17 avril 2015.
Dans ces documents, le Syndicat des Biologistes, après avoir rappelé que "le Code de la Santé publique est incompatible avec l'entrée en bourse d'une société détentrice de participations dans de nombreuses sociétés exploitant des laboratoires de biologie médicale" explique cette introduction en bourse par l'échec de "la stratégie de développement de la société LABCO », consistant en « l'acquisition continue de laboratoires de biologie médicale à des prix artificiellement gonflés », et une course en avant qui « l'a conduite, en 2014, à connaitre une dette brute de 649 millions d'euros pour un chiffre d'affaires annuel d'environ 500 millions d'euros » ( sur ces points, voir article de l'AGEFI du 25 août 2014, LABCO avance vers son introduction à la bourse de Paris ).
L'objectif de l'entrée en bourse est donc évident : la société 3I ne trouvant aucun preneur institutionnel pour le rachat de saparticipation, la direction a décidé de faire porter le risque sur les investisseurs privés non institutionnels.
Ainsi qu'il est par ailleurs exposé dans le courrier adressé à la Ministre de la santé, si dans le dossier adressé à l'AMF l'argent levé en bourse devrait en principe être destiné à racheter des structures libérales, il n'en sera rien, puisque selon la règlementation la société "LABCO ne peut donc plus, en principe racheter de façon majoritaire des sociétés de laboratoires où le capital est détenu en majorité par des biologistes en exercice, soit 70% du marché en France…" (courrier adressé le 28 avril 2015 par l’ AEBM à Madame Marissol TOURAINE).
"Cette fuite en avant de LABCO démontre par ailleurs l'échec du modèle financier poursuivi par LABCO depuis de nombreuses années : ce dernier occasionne un endettement colossal de 650 millions d'euros pour un chiffre d'affaires annuel de 500 millions d'euros, niveau d'endettement assez similaire aux autres sociétés financières investies dans la biologie comme CERBA, NOVESCIA, UNILABS. Ce parcours de LABCO est symptomatique d'une société financière qui, arrivant au bout de ses LBO, est obligée de se retourner vers le petit actionnaire pour assumer des risques de plus en plus élevés (endettement quasi égal au chiffre d'affaires) quand les opérateurs financiers classiques ne veulent plus adhérer à la démarche"(courrier susvisé).
La consultation du procès-verbal des délibérations du conseil d'administration de la société LABCO du 23 février 2015 nous apprend qu'à l'ordre du jour de cette délibération étaient notamment prévues
-l'approbation du principe d'un dépôt du nouveau projet de document de base auprès l'AMF avant fin février
- la confirmation de la suspension des acquisitions significative ou structurantes à court délai après l'IPO (et notamment BIOMNIS), décision en totale contradiction avec le document adressé à l’AMF qui précisait que l’argent collecté par cette entrée en bourse serait réinvesti dans le développement externe de la société
Dans la discussion il est indiqué : "Patrick BONVARLET rappelle que le tunnel d'acquisition présenté à l'AMF lors de la réunion du 12 février dernier est de 63 413 000 euros. Il est donc important pour la bonne instruction du dossier de la société auprès de l'AMF, de ne pas initier des opérations non comprises dans cette enveloppe. Il rappelle également que la société ne pourra, dans les mois suivant son introduction en bourse, réaliser des opérations de fusion acquisitions importantes, de façon à ce qu'il ne puisse pas lui être reproché d'avoir trompé le marché."
Il est indiqué un peu plus loin : "il rappelle qu' Eric SOUETRE a eu accès, en sa qualité de membre du comité de pilotage de l'introduction en bourse, à de l'information confidentielle et sensible et que la large diffusion de son e-mail est très délicate pour la suite de son processus d'introduction en bourse." Il serait donc intéressant de connaitre le contenu de ce mail.
Il serait surtout intéressant de savoir pourquoi et comment une société soumise à des obligations et interdictions légales, compte-tenu de son activité particulière, peut s’affranchir aussi librement de respecter la législation qui lui est applicable, et engager un processus qu’elle sait contraire à la loi, en toute sérénité.
Il ne faudrait pas que la réponse tienne au fait qu’elle se fait conseiller par ROTSCHILD dans cette opération.